Immobilier: bien cerner ses contraintes

Les contraintes réglementaires entourant les biens immobiliers pouvant faire l’objet d’une évaluation immobilière en France.

Evalvé, dans sa volonté de clarification de la pratique, fait le point sur la pratique de l’Expert en évaluation immobilière et notamment sur les contraintes réglementaires qui pèsent sur un bien immobilier qui doivent entrer en compte dans le rapport d’expertise de l’expert immobilier.

Outre les spécificités propres au bien en lui-même, plusieurs critères entourant le bien peuvent, dans certains cas, affecter la valeur du bien. Il ne serait pas pertinent de s’arrêter seulement aux caractéristiques physiques du bien. Ainsi, à quoi cela servirait-il d’évaluer un terrain à bâtir sans tenir compte du fait qu’une conduite de gaz passe en son sous sol, qu’un preneur est titulaire d’un bail à long terme et que diverses contraintes d’urbanisme grèvent le bien?expert-rics-hypzert-rev-certifié

En pratique, cela se révèle souvent auprès d’agent immobiliers recrutés en tant que commerciaux, n’ayant pas ou peu de notions d’urbanisme ou juridiques, laissant les signataires d’un compromis découvrir certains aspects dérangeant lors de la préparation de l’acte authentique par le Notaire (lors de la phase dite des « formalités préalables »), et amenant souvent à la rupture du contrat, ou à une renégociation du prix de vente. Les professionnels du milieu notarial dénigrent souvent ces avant-contrats faits à la « va-vite », et dénoncent le manque de professionnalisme et d’information de l’acquéreur. C’est dans cette optique que les réformes visant à l’obtention de la carte de mandataire immobilier ont été effectuées. Ainsi, les professionnels de l’immobilier doivent désormais justifier d’une expérience significative ou d’un niveau d’étude satisfaisant aux besoins constatés sur le terrain. En réalité, ce n’est clairement pas le cas, et n’importe qui peut toujours exercer la profession sans justifier d’aucunes études en la matière.

Cet aparté prouve qu’il convient donc d’identifier et d’évaluer la majoration ou la minoration que ces facteurs d’ordre réglementaire impliquent pour une évaluation tenant compte de tous les aspects importants du bien, n’en négligeant aucun.

La réglementation d’urbanisme a des conséquences directes sur la valeur des biens, notamment les terrains à bâtir. L’obtention d’une autorisation de construction est primordiale, et joue de manière significative sur le prix du terrain considéré.

expertise-impot-fortune-immobiliere-ifiL’urbanisme joue, non seulement lorsqu’il est déterminant pour le bien lui-même, mais outre mesure lorsqu’il affecte un terrain voisin, et valorise le bien évalué. On peut ainsi penser aux servitudes conventionnelles « non aedificandi » (Interdiction de bâtir sur un fonds) ou « non altius tollendi » (Interdiction de bâtir au-delà d’une certaine hauteur). Une maison construite sur le littoral avec un niveau R+1 se verra avantagée si des servitudes telles qu’évoquées ci-dessus affectent les terrains voisins, par rapport à une maison similaire pouvant voir fleurir des immeubles type R+3 sur les terrains alentours, masquant l’une des caractéristiques essentielles de l’habitat littoral, à savoir la vue sur la mer.

Le droit de construire est restreint dans certains cas :

  • Servitudes aéronautiques
  • Capacité de construction très réduite
  • Transfert de COS déjà effectué (au profit d’une parcelle voisine)
  • Zones particulières (agricoles, naturelles, pour lesquelles sont autorisées seulement certaines constructions)

De nombreux autres cas existent, la liste serait longue si elle s’attachait à être complète. On retiendra ici que l’urbanisme a des incidences sur la valeur du bien évalué. Le code de l’expropriation le montre également « L’évaluation des terrains à bâtir tient compte des possibilités légales et effectives de construction qui existaient à l’une ou l’autre des dates de référence (…), de la capacité des équipements susvisés, des servitudes affectant l’utilisation des sols et notamment des servitudes d’utilité publique, y compris les restrictions administratives au droit de construire, sauf si leur institution révèle, de la part de l’expropriant, une intention dolosive ».

expert-tribunal-immobilier-agreeLa vacance du bien immobilier doit également être prise en compte. Un bien immobilier loué devra, pour être évalué, subir une minoration du fait du locataire en place. Cas flagrant pour illustrer ces dires, la vente de terres agricoles prises en fermage par un agriculteur, dont le congé est difficile à donner. La disponibilité est donc à prendre en compte lors de l’estimation réalisée. En matière de baux commerciaux, même si la faculté de mettre fin au bail demeure plus aisée, il sera tout de même difficile d’y mettre fin, sauf à allouer d’importantes indemnités de fin de bail ou d’obtenir l’accord du locataire, qui n’y a pas intérêt. Le principe en cette matière est de dire que plus il s’avèrera difficile d’évincer le locataire, plus la valeur du bien en sera diminuée.

En matière d’estimation de biens occupés, deux méthodologies sont appliquées par les Experts :

  • La première consiste à soustraire, sur la valeur du bien libre, des indemnités d’éviction à verser au locataire ou preneur en place. Cette méthode est utilisée notamment par l’administration lors des procédures d’expropriation.
  • La seconde met en œuvre l’application d’un coefficient d’abattement considérant la perte de valeur résultant de l’occupation du bien, car « à caractéristiques égales, un fonds libre s’apprécie de 15 % par rapport à un fonds loué. Cette statistique est confirmée par les dires des Experts. Néanmoins, la situation doit être appréhendée au cas par cas, car il s’agit d’une moyenne qui sert à illustrer la situation générale, en aucun cas à utiliser systématiquement en cas d’estimation foncière. Pour les baux qui arrivent à échéances, il suffit de calculer la valeur locative et de retirer les pertes liées au bail et les capitaliser.

estimation-impot-fortune-immobiliere-ifiCe coefficient d’abattement dépendra de la durée restant à courir, du montant des mensualités, et du type de location. Ces méthodes n’étant pas toujours efficaces et pertinentes (lorsque les indemnités sont supérieures à la valeur probable du terrain par exemple, l’administration considère alors la valeur de l’indemnité d’éviction d’un montant obligatoirement inférieur à 50% de la valeur du bien.

Une exception réside toutefois pour la situation dans laquelle le bien fait l’objet d’un bail à très longue durée ou d’un bail emphytéotique), la recherche de biens similaires observés sur le marché permet une fixation du prix par comparaison, méthode d’estimation qui s’avérera plus pertinente dans nombre de cas, que nous verrons ultérieurement.

Les droits conférés sur le bien doivent par ailleurs être pris en compte. Les servitudes ou droits de divers ordre peuvent porter atteinte à la valeur vénale. Ainsi en est-il d’un domaine forestier étant grevé d’un droit de chasse suivant un bail à long terme (un bail ne prévoyant aucune durée est réputé renouvelable chaque année, la fin du bail étant faite par dénonciation de l’une ou de l’autre des parties six mois avant la fermeture officielle de la chasse, et prend effet l’année cynégétique suivante).

Restant dans le domaine des servitudes de droit privé, la localisation au sein d’un lotissement (il faudra alors consulter le règlement et le cahier des charges, car étant potentiellement porteurs de restrictions plus importantes que le document d’urbanisme sur la question de la constructibilité), l’existence d’une servitude de passage légale, ou encore d’une servitude de minoration de densité, ces servitudes de droit privé devant être considérées lors de l’évaluation du bien. Un droit de passage est attaché à la parcelle. Il peut être à durée déterminée (servitude pour l’exploitation d’un fonds, de manière temporaire) ou à durée indéterminée (droit de puisage transmis au fil des années).estimer-prix-parking-stationnement-garage

Des servitudes d’utilité publique peuvent également frapper le bien considéré. Il s’agit de limitations administratives au droit de propriété (par exemple à vocation restrictive pour la construction). Le certificat d’urbanisme n’en donne pas forcément la liste complète, malgré le fait que ces servitudes doivent figurer en annexe au PLU conformément à l’article L.126-1 du Code de l’Urbanisme. Il convient donc de se renseigner de l’existence de la totalité de ces servitudes. Elles peuvent avoir pour objet la protection du patrimoine, la défense nationale ; la sécurité publique, la distribution d’énergie…

En matière environnementale, des servitudes peuvent également être créées dans un but précis (installations classées par exemple ; ou encore l’article L.235-9 du code rural, instaurant une servitude de pêche 1.50 m le long des cours d’eau réputés domaniaux pour tous et une servitude de marchepied de 3.25 m bénéficiant aux agents de la police des eaux et de la pêche).

Il est ici à noter que le débat public pourrait être amené à considérer une servitude environnementale, similaire à celle instaurée aux Etats Unis dans le programme « National Landscape Conservation System ».

On peut donc voir qu’outre la spécificité du bien en sa nature, certains aspects sont primordiaux, et de nombreux points d’ordre réglementaire dénatureraient l’estimation de la valeur s’ils venaient à être négligés. L’Expert y prête une grande attention lors de la détermination de la valeur vénale.

 

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